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Les coopératives de travail associé bâtissent une économie plus forte: leçons depuis la Zambie

Le 4 juillet 2015 le monde a célébré la Journée internationale des coopératives. Il faut savoir que créer une économie forte implique de faire davantage que se contenter de demander de l’emploi ou des services aux municipalités et aux ministères, l’idéal est que les communautés en assument elle-même la responsabilité au sein de leurs propres territoires. L’autonomisation naît lorsque les individus prennent en mains une grande partie de leur vie et elle devient alors un moyen de se donner le droit de contrôler et d’exercer le pouvoir dans d’autres domaines.

6 juillet 2015

Par Phahlani Moyo

Puisque les coopératives sont détenues et contrôlées démocratiquement par leurs membres, l’autonomisation fait partie intégrante de l’adhésion. Le coopérativisme moderne est arrivé en Afrique au Kenya, en Tanzanie, au Botswana et en Zambie pendant la période coloniale comme instrument de consolidation et d’organisation de la domination britannique.

À cette époque, les noirs africains n’étaient pas autorisés à être membres des coopératives officielles mais en étaient réduits à n’être que de simples ouvriers agricoles. Ce qui est certain c’est que même avant la domination britannique, il existait une certaine forme de coopération traditionnelle où les gens travaillaient ensemble à l’occasion de chasses, de funérailles, de mariages, pour les travaux agricoles comme cela est encore pratiqué dans de nombreuses cultures africaines. Coopérer est mieux que de travailler seul : l’Harambee au Kenya, l’Ujuma en Tanzanie et l’Humanisme en Zambie ont joué un rôle essentiel pour aider les États nouvellement indépendants à se forger une identité différente de leurs maîtres coloniaux. Cela date du temps de la transition vers l’indépendance où l’idéologie coopérative est devenue un pilier de personnes qui se réunissaient pour lutter pour l’indépendance et comme un modèle de socialisme africain pour obtenir l’indépendance économique et l’autonomie politique. Mais ces idéologies n’ont jamais vraiment travaillé à l’amélioration de l’indépendance économique, aussi le début des années 1990 a-t-il vu s’effondrer le socialisme et naître une nouvelle ère de libéralisation économique.

Dans la société les ouvriers et les gens ordinaires doivent réaliser leur potentiel et prendre des décisions fondamentales sur le plan économique. Chaque jour qui vient ils sont confrontés à des privations diverses et les niveaux de pauvreté continuent de croître dans de nombreuses communautés. Depuis plus de cinquante ans les pauvres et la classe moyenne doivent relever de nombreux défis, contre l’inégalité, la faim, le chômage et l’insuffisance des infrastructures qui n’ont cessé de croître.
Quel devrait être notre programme économique et politique ? Commençons-nous à lutter pour un programme économique progressiste qui crée des emplois, augmente les salaires, protège l’environnement, fournit des soins de santé pour tous, responsabilise les citoyens et génère des revenus ? Comment les pauvres et la classe moyenne sont-ils préparés pour exercer le pouvoir politique et économique afin de créer un monde plus juste ?

Pour y répondre il est nécessaire de se diversifier et de s’ouvrir à des formes de coopératives autres que les coopératives agricoles historiques qui constituent l’essentiel du mouvement coopératif en Zambie. Il est nécessaire de créer des coopératives de travail associé, des coopératives municipales, des coopératives bancaires, des coopératives d’assurance et des coopératives d’habitation afin de créer plus de propriétaires en particulier dans les communautés puisque la propriété construit la richesse et que la propriété coopérative est l’alternative à la dépendance aux emplois peu rémunérés de la vente au détail et de l’industrie des services. Il est nécessaire d’envisager d’autres coopératives de travail associé, d’artisans, de consultants et de professionnels qui peuvent établir leurs propres entreprises coopératives. Par définition, une coopérative de travail associé est une entreprise gérée démocratiquement, détenue et contrôlée par ses travailleurs. La forme d’organisation coopérative permet aux gens ordinaires de mettre en commun leur énergie, leurs capitaux ; leurs talents et leurs compétences pour obtenir un emploi et un revenu stable, participer à la gestion de leur entreprise et partager les bénéfices sur la base de leur participation.

Pour y parvenir la philosophie est d’inciter le gouvernement local à donner la priorité à la gestion des affaires économiques et sociales du pays par le biais d’un système de gouvernance décentralisée. Nous avons besoin d’un pays ouvert aux coopératives appartenant aux travailleurs en créant un Institut pour le développement coopératif et d’une infrastructure au sein du conseil ainsi mis en place pour créer un fonds d’investissement qui fournirait une assistance technique aux personnes intéressées par les idéaux coopératifs et l’amélioration des travaux civils. Les conseils pourraient aller plus avant et créer un fonds de crédit renouvelable qui soutiendrait les coopératives et les PME en démarrage avec des taux d’intérêt inférieurs aux taux bancaires courants.

Les coopératives peuvent à coup sûr résoudre le problème des taux alarmants d’inégalité des revenus en assurant des salaires plus élevés que les emplois traditionnels disponibles sur le marché du travail actuel. Il existe des exemples mondiaux de sociétés reprises par les travailleurs et aujourd’hui entre leurs mains comme dans le monde entier. En plus d’emplois mieux rémunérés, les coopératives fournissent aux jeunes, aux résidents locaux, aux femmes et même aux ex-détenus un moyen de devenir propriétaires. Cela augmente le revenu des ménages et diminue le chômage et la pauvreté. Cela crée également des communautés stables et prospères et une assiette fiscale plus forte pour l’économie de notre ville sur son territoire. Cette approche peut aider de nombreux pays africains à adopter les coopératives pour sauver une économie en déclin.

Phahlani Moyo est un chercheur zambien auteur de plusieurs ouvrages sur les coopératives “The Other side of The Cooperative Economy : Worker Cooperative Ideal for Industrialization and Localization”.

*Caption : ICRISAT-Lilongwe and the Eastern Province Farmers’ Cooperative Ltd
(EPFC) in Kabunda village to solicit farmers’ opinion on a groundnut shelling machine.